Legris Samuel
Doctorant en sociologie, Université de Pau et des pays de l'Adour
Contact : samuel.legris(at)univ-pau.fr
Titre de la thèse : Une sociologie des mouvements populaires contemporains : les mobilisations anti-pass en France
Sous la direction de Stéphanie Dechezelles (Tree) et Jeremy Ward
Dans le sillage du mouvement des Gilets jaunes, les mobilisations anti-pass (sanitaire puis vaccinal) rythment l'actualité française chaque samedi depuis le 17 juillet 2021. Peu de travaux en sciences sociales leur ont toutefois été dédiés à ce jour. Afin de combler ce manque, le présent projet de thèse vise à éclairer les angles morts des mouvements populaires contemporains en prenant pour objet d'étude les mobilisations anti-pass. Ces contestations qui naissent largement à l'écart des structures syndicales et partisanes rassemblent un public hétérogène, dont une fraction substantielle appartient aux catégories populaires. Nous tâcherons de comprendre les conditions dans lesquelles émergent et puis tendent à persister les mouvements populaires contemporains en France. Pour cela, nous nous situerons au croisement de la sociologie des mouvements sociaux et de celle des classes populaires. Nous accorderons une attention particulière à la littérature scientifique consacrée aux Gilets jaunes, souvent elle-même à l'intersection de ces deux sous-champs. Deux axes de recherche principaux guideront notre recherche structurée autour des enjeux de composition du et dans le mouvement anti-pass. La composition du mouvement renvoie à l'identité des acteurs des mobilisations anti-pass tandis que la composition dans le mouvement désigne les alliances et les conflits internes. D'une part, nous nous demanderons qui compose le mouvement. Plus précisément, nous examinerons ce qui rapproche et distingue les opposants à la politique sanitaire de 2021-2022 des Gilets jaunes de 2018-2019. Ce faisant, nous réfléchirons à la pertinence de rassembler le soulèvement des Gilets jaunes et la contestation anti-pass sous l'expression « mouvements populaires contemporains ». D'autre part, nous considérerons les dissensions et les tensions internes autant que les convergences et les coalitions qui se nouent au sein du mouvement anti-pass. Autrement dit, nous étudierons comment tentent de composer les acteurs de la contestation en dépit de leurs différences et s'ils y parviennent. Cette recherche entend notamment saisir les rapprochements qui s'opèrent entre des composantes de gauche radicale et de droite radicale dans le cadre de la mobilisation. Plus largement, nous aspirons à appréhender les fondements intellectuels et idéologiques des différentes branches du mouvement anti-pass. Parce que la composition dans le mouvement et celle du mouvement sont intimement liées, nous observerons spécifiquement l'implantation des thèses conspirationnistes au sein de la contestation ainsi que les effets de leur diffusion sur la composition des mobilisations. Notre étude sera fondée sur une analyse comparative du mouvement anti-pass dans l'Indre et les Pyrénées-Atlantiques. Nous réaliserons d'une part deux enquêtes ethnographiques en adoptant une approche qualitative (observation participante dans les manifestations, réalisation d'entretiens semi-directifs avec des acteurs du mouvement). D'autre part, nous extrairons les données issues des réseaux sociaux numériques (Facebook, Messenger, Telegram) sur lesquels s'organise le mouvement à l'échelle locale à travers les échanges entre ses différents acteurs. Nous collecterons parallèlement des données numériques sur les sites officiels des partis politiques, syndicats et associations qui se sont prononcés sur les mobilisations contre les mesures politico-sanitaires afin d'étudier la manière dont se coordonne ce mouvement au-delà des échelles locales.