Réguler et produire les médicaments contre le paludisme au Ghana et au Bénin : une affaire d’Etat ? Politiques pharmaceutiques, normes de qualité et marchés de médicaments
Soutenance de thèse de doctorat en sociologie de Jessica Pourraz
30 janvier 2019, à 14h
EHESS, salle BS1_28, 54 boulevard Raspail, 75006 Paris
Jury
- Carine Baxerres, Chargée de recherche, IRD (co-directrice de thèse)
- Bruno Boidin, Professeur, Université de Lille 1 (rapporteur)
- Maurice Cassier, Directeur de recherche, CNRS (directeur de thèse)
- Fred Eboko, Directeur de recherche, IRD
- Pierre Fournier, Professeur, Université Aix-Marseille (rapporteur)
- Jean Paul Gaudillière, Directeur de recherche INSERM, EHESS
- Boris Hauray, Chargé de recherche, INSERM
- Catherine Le Galès, Directrice de recherche, Inserm
Résumé
Le Bénin et le Ghana, bien que confrontés aux mêmes enjeux de santé publique dans la lutte contre le paludisme, ne déploient pas les mêmes politiques pharmaceutiques nationales afin de garantir à la population l’accès à des médicaments de qualité et abordables financièrement. Ils sont équipés d’appareils de régulation pharmaceutique et de capacités locales de production distincts. Ces différences découlent de leur héritage colonial et de leurs itinéraires historique, politique et économique. A partir de 2004, le Bénin et le Ghana adoptent les Combinaisons Thérapeutiques à base d’Artémisinine (CTA) afin de remplacer les anciennes molécules jugées inefficaces pour le traitement du paludisme. Se pose alors pour les pays l’enjeu du coût élevé de ces nouveaux médicaments. Les nouvelles recommandations d’usage de l’OMS et les financements internationaux octroyés pour l’achat de ces traitements provoquent une stimulation de l’innovation pharmaceutique et de la production de ces médicaments en Europe, en Amérique du Nord et en Asie. On observe alors au Bénin et au Ghana une arène d’acteurs transnationaux se mettre progressivement en place pour l’approvisionnement des CTA. Ils génèrent de nouveaux réseaux d’approvisionnements qui entrent en concurrence avec ceux existants dans les pays. Les aides financières sont conditionnées à l’achat de CTA préqualifiées par l’OMS, certification dont les industries pharmaceutiques ghanéennes ne bénéficient pas, ce qui les laisse en marge de ce marché. Face aux exigences et aux conditions imposées par les acteurs transnationaux, les pays ne disposent que d’une faible marge de manœuvre dans la conduite de leurs politiques publiques. S’appuyant sur des entretiens, des enquêtes ethnographiques menées auprès des acteurs nationaux de la réglementation pharmaceutique, des firmes pharmaceutiques ghanéennes et des acteurs transnationaux finançant les CTA, ainsi que sur des archives, ce travail interroge les dispositifs institutionnels sur lesquels s’appuient les Etats du Bénin et du Ghana pour déployer leur politique pharmaceutique nationale et construire leur souveraineté en la matière.